Lors de l’exercice du 3 décembre dernier, j’ai contribué au sein d’une équipe de 5 étudiants, à faire vivre une situation de débat dans un contexte de classe universitaire où nos collègues ont joué le rôle d’élèves du secondaire. Voici ce que je retiens de l’expérience.
Ce qu’il y a d’intéressant avec le débat, c’est qu’il permet de mobiliser une quantité de compétences tout à fait impressionnantes dans le cadre de sa réalisation en U.S.. Par ailleurs, Duquette et Lafrance (2009) posent cette question tout à fait pertinente : « Est-ce que nos élèves peuvent devenir des citoyens actifs et critiques si, tout au long de leur formation scolaire, ils n’ont pas eu la chance de discuter de questions socialement vives (QSV) […] ?». Cette interrogation est tout à fait légitime lorsque l’on considère les visées du programme d’univers social, car l’une des trois principales compétences vise explicitement à développer une conscience citoyenne.
D’emblée, deux questions nous viennent à l’esprit par rapport à cette réflexion que nous posons, celle de la place du débat, mais aussi celle de la notion de question socialement vive (QSV). Le débat est un exercice de discussion argumentée. Il peut prendre plusieurs formes (la revue Enjeux de l’univers social en considère trois) soit la forme euristique, celle délibérative et finalement la très connue polémique. Toutes ces types de débats ont une chose en commun, celle d’amener les élèves à confronter, sous diverses formes, leur point de vue, leur compréhension et leur valeur à celle des autres membres du groupe au sein duquel ils débattent. En plus, dans le cadre d’un débat médié par un enseignant, ceux-ci doivent être en mesure de baser leur argumentaire sur des faits issus d’un passé (ou d’expériences collectives) vécu(es) plus ou moins loin en fonction de l’enjeu en se référant à des textes scientifiques. N’est-ce pas implicitement travaillée au développement de la conscience citoyenne?
Au-delà de cet exercice de citoyenneté, les apprenants sont non seulement, en préparation au débat, amené à se positionner et à étayer cette position en interprétant divers documents, mais aussi en se questionnant l’enjeu. Ce sont ici d’autres attitudes liées aux compétences du programme d’univers social sur lesquels on peut travailler lorsqu’on monte une situation d’apprentissage axé autour du débat. Ensuite vient la notion de question socialement vive. Si on s’entend globalement pour faire valoir ce concept, c’est qu’il permet d’intégrer le sens, l’implication émotive et l’exercice disciplinaire en un seul bloc.
Néanmoins, ce que démontre notre simulation du 3 décembre, c’est que le pont entre la QSV et l’exercice historique ne se fait pas si aisément. Dans une tentative peu fructueuse de lier les impacts observables de la révolution industrielle à la notion de classe sociale actuelle, nous avons constaté de deux choses l’une. Premièrement que ce n’était pas chose facile, mais ensuite, qu’au final, mieux valait une question historique pertinente, permettant le positionnement multiple, qu’une QSV dénaturée par un exercice de contorsion intellectuel. J’exagère un peu. À peine. La pertinence du concept de QSV est à mon avis établie. Cependant, son emploi n’est peut-être pas pertinent avec n’importe lequel des concepts que l’on aborde en classe. Certains sujets s’y prêtent davantage et l’angle (chronologique/thématique) qu’on emploie peut avoir une influence sur le choix de la question qu’on soumet aux élèves.
Au final, l’expérience fut enrichissante. Il apparaît qu’il n’est, tout d’abord, pas si facile d’orienter une discussion euristique sur un concept historique comme la révolution industrielle en grand groupe, mais je crois que nous pouvons dire qu’avec une réalisation de S.A. complète et un objectif (une question) mieux ciblé(e), nous aurions été en mesure de contribuer au développement d’attitudes et de compétences tout à fait pertinentes et en lien avec la discipline qu’est l’univers social.
Lafrance, Sonia et Duquette, Catherine. « Enseigner l’histoire grâce aux controverses » dans Enjeux de l’univers social, vol. 5, no°1, 2009, p.27 à 32.