Toujours dans le cadre de cette série de billets portant sur différentes FP expérimentées en contexte de simulation, nous allons ici explorer l’apprentissage muséal.
L’expérience :
Lors de notre simulation, les étudiantes responsables de faire découvrir la FP au reste du groupe ont approché l’activité sous l’angle de la compétence 2 en étudiant la réalité sociale « Revendications et luttes dans la colonie britannique ». Aléatoirement, une fiche était distribuée aux différentes équipes formées sur le vif avec chacune un thème différent. L’objectif était, pour chaque équipe, de trouver un artéfact au courant de la visite nous permettant d’approfondir notre compréhension/connaissance du thème que l’on nous avait confié pour ensuite partager en grand groupe notre « source » et l’interprétation qu’on en faisait. L’idée est bonne et la démarche pertinente, car elles visent à rendre l’apprenant actif dans sa visite et elle met en place certaines conditions au développement d’une « compétence historique ». Expérimenter cette démarche m’a fait réfléchir sur différentes modifications que l’on pourrait faire afin de donner une autre dimension à l’activité.
Tout d’abord, pour rendre la tâche signifiante, il faut mettre en place les conditions propices à l’engagement de l’élève. Il me semble alors tout à fait avisé de lui laisser toute la latitude quant à la question qu’il choisit d’interroger. Inviter l’élève à formuler lui-même une problématique quant à la nature de la réalité sociale étudiée est tout à fait conforme à l’esprit des pédagogies constructivistes modernes et permet en plus d’effleurer certaines composantes de la compétence 1 du programme d’HEC. Par ailleurs, ce que propose le modèle d’interstructuration cognitive de Lenoir (2005), c’est de mettre en relation l’apprenant et l’objet d’étude dans une perspective de questionnement des schèmes de l’élève. Ceci dit, pour que l’élève en vienne à se poser une question pertinente sur la réalité étudiée, une période de préparation en classe avant la visite est souhaitable.
Pendant la visite du musée, l’enseignant peut ainsi circuler au sein du groupe et aiguiller les élèves dans leur recherche d’artéfact leur permettant de se construire une interprétation de l’histoire en fonction de leur question respective. Notons qu’il est préférable que tous les élèves aient à remplir une fiche et pas seulement l’un des 5 membres de l’équipe (comme c’était le cas lors de notre simulation) sans quoi l’enquête devient bien vite l’affaire du plus motivé d’entre eux. La formation d’équipe n’est cependant pas impertinente, mais j’opterais davantage pour un regroupement des élèves qui ont des questions/hypothèses historiques semblables lors du retour en classe, afin de confronter leur interprétation en fonction des sources utilisées. Le retour en classe est une autre étape primordiale et probablement une occasion d’intégration intéressante (retour en équipe d’expert avant de partager les diverses conclusions tirées en fonction des questions posées en grand groupe).
Conclusions :
D’un point de vue pratique, la mise en place d’une visite muséale semble relativement complexe. Ce qui est ressorti de la simulation vécue au musée Stewart semblait confirmer que les contraintes liées au temps et à la faisabilité en milieu scolaire étaient nombreuses.
Mais passons outre ces difficultés d’ordre technique. Sur le plan pédagogique et didactique, il semble y avoir un certain nombre d’éléments à respecter si l’on veut rendre l’activité muséale pertinente dans un contexte scolaire. Tout d’abord, la médiation enseignante. À ce titre, le GREM a développé un modèle didactique d’éducation muséale très près des visées didactiques que nous connaissons. Ce modèle se base sur le constat que le musée est un endroit où la transposition didactique est naturelle et adaptée aux élèves. Sommairement, ce que suggère le GREM, c’est d’intervenir avant en classe (pour contextualiser et interroger le sujet d’étude), pendant la visite (pour guider l’apprenant dans la réalisation d’une tâche donnée) et après (pour analyser, synthétiser et intégrer l’objet d’étude). Notons aussi que l’approche muséale se veut souvent une approche d’hétérostructuration cognitive coactive (voir méthode pédagogique du musée Stewart) alors que les orientations du programme de formation se basent davantage sur une pédagogie d’interstructuration cognitive (Lenoir 2005). Ce constat rend donc encore plus importante la mise en place d’une activité éducative qui va au-delà de la visite guidée du musée.
Finalement, gardons à l’esprit, en tant qu’enseignant, que la mission d’un musée est « de recueillir, de conserver, d’étudier et d’exposer des témoins matériels de l’homme et de son environnement », et ce, avec une vision historique qui lui est propre alors que celle de l’enseignant d’histoire est principalement de contribuer à la formation d’esprits critiques. Deux choses qui ne sont pas nécessairement en contradiction, mais qui demandent qu’on y réfléchisse.