Dernier billet sur les différentes formules pédagogiques testées en laboratoire de didactique
Peut-on rendre l’apprentissage amusant sans en réduire la pertinence au plan pédagogicodidactique? L’une des formules pédagogiques que nous avons mises en application de façon expérimentale en cours de didactique semble avoir cette aspiration.
Selon Chamberland (1995), le jeu pédagogique se veut une formule qui allie chance et science. Le jeu peut prendre plusieurs formes. On le considère parfois près de la simulation, d’autres fois il s’agit davantage d’une adaptation d’un jeu courant (Donjons et Dragons, Risk, Bingo, etc.) ou encore, comme ce fut le cas lors de notre application, il peut s’agir d’une formule tout à fait nouvelle et originale.
Forces et faiblesses
Les aspects techniques entourant la planification, la création et la gestion du temps représentent les principaux défis à relever (coûts, créativité, longueur variable de l’activité, taille des groupes, ressources, etc.). Cependant, je ne consacrerai pas ce billet à ces considérations techniques.
Autrement, ce qui m’est apparu comme l’une des principales faiblesses du jeu, c’est son faible potentiel de transférabilité. Il m’a semblé, à la lumière du texte de Chamberland (1995), mais aussi du jeu lié à l’évolution de l’écriture dans nos sociétés qu’a présenté l’équipe responsable de la FP, qu’il était difficile de décontextualiser cette expérience pour la réinvestir. Si on devait situer les apprentissages possibles grâce à cette FP dans la taxonomie de Bloom (1956), il conviendrait de considérer surtout les niveaux que sont l’acquisition de connaissances et la compréhension sommaire.
Cependant, le jeu possède des propriétés pédagogiques intéressantes et celles-ci sont surtout liées aux aspects motivationnels, sociaux et cognitifs. Sur le plan de la motivation, le fait d’intégrer un facteur chance et d’ajouter un aspect de saine compétitivité et de collaboration permet d’engager les élèves et de les plonger dans une démarche active plutôt que passive. Au niveau social, l’interaction qu’implique le jeu (quoiqu’il puisse être individuel) est intéressante, car il cadre très bien dans les volets collectifs que veut développer le PFÉQ (mission : socialiser ; compétence transversale : coopérer, communiquer). Finalement, ce que l’on entend par cognitif, c’est le fait que l’activité permet, en amorce surtout, de confronter les élèves de façon subjective à un concept et de créer un choc cognitif qui se base sur l’expérience ou l’observation qu’il fait lors de la séance de jeu. Par exemple, cette simulation de FP nous a fait réaliser qu’on ne pouvait mieux comprendre ce qu’impliquait être moine copiste au moyen-âge ou encore expérimenter les balbutiements du cunéiforme qu’en tentant par nous même de retranscrire la bible à l’aide d’une plume ou de créer notre système écrit de classification agricole.
Pistes de réflexion supplémentaires
Le jeu que nous avons expérimenté tablait sur la compétitivité entre les équipes pour stimuler l’engagement, mais il aurait aussi pu être intéressant de préconiser une motivation interne plutôt qu’externe. Par exemple, l’objectif aurait pu être de réussir les 4 tâches à l’intérieur d’un certain laps de temps plutôt que de le terminer avant l’équipe adverse. Cette formule aurait diminué l’effet de course et de compétition entre les équipes et laissé plus de temps aux équipes pour approfondir les documents qu’ils devaient manipuler plutôt que de les passer le plus rapidement possible pour exécuter la tâche.
Au final, il le jeu est un outil qui a sa place à l’école, malgré les contraintes qui le caractérisent, il présente des avantages intéressants. L’ensemble de cette analyse peut sans doute être transposable aux jeux vidéo qui présentent certaines des caractéristiques que nous venons de voir. D’ailleurs, la richesse du numérique semble entrouvrir une porte à la complexification des jeux et donc à un potentiel d’apprentissage plus élevé, qui dépasserait possiblement l’acquisition de connaissances et le développement de la compréhension au profit de potentialités liées à l’application, l’analyse et peut-être même à la créativité.
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